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Musique afghane en exil

Entretien avec le groupe Shams Créé en 1994, le groupe Shams, composé de 5 musiciens et d'une danseuse, sort son premier album cette année. CMTRA : Pouvez-vous vous présenter et nous dire quelle place chacun occupe dans le groupe ?

Benafcha, je danse dans le groupe Shams depuis 1996, et depuis quelques temps je chante.

Bismillah Khusravi, je joue des tablas, des percussions et du dholak dans le groupe, je chante parfois.

Pierre Fassy, je suis dans le groupe depuis maintenant deux ans, je joue de la flûte traversière à six trous et du saxophone.

Massoud Raonaq, je suis chanteur dans le groupe, je joue de l'harmonium, des tablas aussi parfois.Il y aussi Homayoun Raonaq, qui joue de l'harmonium et qui chante, et Ghaffar Ehsani, qui joue du rubab. Quel est le répertoire du groupe ?

Shams : Nous essayons de présenter un répertoire assez varié : des chants populaires, des morceaux instrumentaux et également un registre semi-classique de chants d'amour, le ghazal, qui s'inspire de la musique savante en restant proche de la musique populaire.La musique populaire est essentiellement musique de danse, elle est un peu en opposition au ghazal, plus spirituel et plus élaboré.

Les thèmes des ghazals peuvent être profanes ou spirituels, selon les poèmes, ce qui est différent du qawwali, que lon connaît avec Nusrat Fateh Ali Khan, qui est un genre semi-classique purement religieux. ||| Comment les instruments non traditionnels s'intègrent-ils dans votre musique ?

Pierre : On trouve le saxophone dans certains arrangements de variété depuis vingt à trente ans dans la musique afghane. Tout comme la trompette, la clarinette et l'accordéon, qui a une sonorité proche de l'harmonium et qui peut le remplacer parfois. Je pense que cela n'a rien d'exceptionnel. Vous composez des morceaux ?

S. : Nous composons dans les deux genres musicaux : le populaire et le semi-classique. Pour l'album, nous présentons aussi des chants et morceaux instrumentaux appartenant au répertoire traditionnel afghan, tout en gardant l'équilibre entre tous ces domaines. Quand sort votre album ?

S. : L'album, enregistré en octobre, sortira dans le premier trimestre 2003. Il sera distribué par Harmonia Mundi. Le groupe existe depuis 1994, votre premier album sort en 2003, pourquoi avoir attendu si longtemps ?

Massoud : Il est vrai que le groupe existe depuis 1994, mais nous ne nous sentions pas prêts pour sortir un CD, nous n'avions pas assez de compositions personnelles, et les occasions ne se présentaient pas. Nous avons fait ces derniers temps un travail d'analyse de la musique, qui nous a encouragé à présenter quelque chose de cohérent. Avec l'arrivée de Pierre notamment, et avec les autres membres du groupe, nous avons engagé une réflexion pour retrouver les ingrédients essentiels de cette musique.

Pierre : Les enregistrements de musique traditionnelle afghane que l'on trouve dans le commerce ont été réalisés en Afghanistan, il y a très peu d'enregistrements réalisés en dehors du pays. Notre disque témoigne d'un phénomène important, c'est quil y a beaucoup de musiciens qui ont dû quitter leur pays et ont fait comme ils pouvaient pour pouvoir continuer à jouer leur musique. Ma présence dans le groupe, en tant qu'occidental, est un élément qui découle de ce phénomène : si Massoud n'était pas venu en France, je naurais jamais pu jouer avec eux. Et eux seraient restés dans leur culture, avec leurs habitudes, etc.

Massoud : Et nous n'aurions peut-être pas joué la même chose. ||| Que vous apporte le fait d'être un groupe composé d'Afghans et de Français ?

Pierre : Pour ma part, j'ai une formation musicale occidentale complètement différente de la leur, qui nous oblige à réfléchir sur beaucoup de choses.

Massoud : Notre dialogue a été très intéressant car il nous a permis d'expliquer ce que nous jouions de façon intuitive et spontanée. Cest une bonne démarche pour la clarification de la musique afghane.

S. : Ce que nous voulions mettre en avant, cest la musique d'Afghans en exil, et déjà on sent le métissage ici, avec une approche moderne qui correspond un peu à un goût différent, au point de vue que nous avons en France. Le groupe sest-il adapté d'une manière ou d'une autre aux "habitudes occidentales" ?

S. : Au début, il a fallu faire un effort de communication et d'adaptation. Mais, plus nous avançons, plus nous prenons confiance. Nous connaissons mieux notre musique et sommes donc mieux à même de la défendre. Comment présentez-vous votre musique au public ?

S. : Nous avions remarqué au début que les musiques rythmées passaient bien, certains rythmes en revanche moins, notamment le "moroli", un rythme 7/8, asymétrique. La situation actuelle en France n'arrange pas les choses : l'uniformisation commerciale a imposé les rythmes binaires, au détriment dautres rythmes qui se sont perdus. Nous avons privilégié des morceaux bien dynamiques et bien rythmés, mais maintenant nous faisons un effort pour revenir par exemple à ce fameux 7/8, à des particularités afghanes. Est-ce que vous traduisez les paroles de vos chansons pour que le public comprenne mieux votre musique ?

S. : Effectivement, le public français donne beaucoup d'importance au texte. Nous faisons l'effort d'expliquer les textes au début de certains morceaux, sans que cela ne devienne une conférence pour autant. Cela fait partie des adaptations. De quoi parlent les textes que vous composez ?

S. : Les compositions dépendent beaucoup de la sensibilité de chacun. Nos textes ne figurent pas dans le cd, cest une chose qui est en route.

Benafcha : J'écris de temps en temps des paroles, ce sont des chansons d'amour souvent, et 'jai un texte qui parle de la séparation de la patrie, de ce que je ressens, j'ai essayé d'exprimer ce qui manque quand on est loin de son pays.

Massoud : Je suis plus sensibilisé aux thèmes tournant autour de la spiritualité. Le nom du groupe que nous avons choisi est une allusion au personnage Shams. Il fut le maître de Mawlana Roumi, un personnage qui a existé aux 12è, 13è siècle, un maître spirituel. J'essaie de mettre en avant l'aspect de mysticisme et de spiritualité afghane. Comment se passe le travail de composition ?

S. : Nous navons pas de méthode éprouvée pour cela, ça dépend de qui compose. Il n'y a pas d'écriture, c'est une musique de transmission orale. Chacun compose en fonction de ses influences. Massoud est influencé par les musiques de l'Inde du Nord, ses ghazals sont proches de ces esthétiques, Hamayoun est plus proche de la musique populaire. Pour les arrangements, tout le monde a participé. Même dans un travail individuel, les avis et conseils des autres sont les bienvenus. Quelle est la part dimprovisation dans votre musique ?

S. : Très faible. L'air de rien les choses sont très fixées, même si elles ne sont pas écrites. Il n'y a pas de prise de parole d'un musicien pendant dix minutes. La musique reste mobile, mais les choses sont relativement codifiées. Est-ce que vous pouvez nous parler du rôle des tablas et des percussions ?

Bismillah : Le tabla et le dholak sont très utilisés pour accompagner toutes sortes de chant et de danses. En général, les percussions ont vraiment un rôle daccompagnement. Par contre, dans la musique populaire maintenant, dans le ghazal et le semi-classique, il y a une part de parole et d'improvisation de la part des instrumentistes.

Le tabla sert dans les introductions et dans certains passages, qui peuvent être libres. Mais les musiciens savent toujours dans quel morceau ils se trouvent, et quelle est sa structure. Le tabla étant un instrument assez virtuose, il y a un intérêt à le mettre en avant. C'est un instrument qui s'accorde, il y a des intonations, des sons onomatopées dans son langage, on peut donc dire quil participe à la mélodie de la musique afghane. Vous employez le terme de semi-classique, que signifie-t-il ?

S. : En Occident, il y a un registre populaire et un registre classique. Dans la musique orientale, cest un peu différent. Le classique, dans la musique Hindoustani qui se joue dans le nord de l'Inde, le Pakistan et le sud de l'Afghanistan, c'est par exemple le raga, avec des morceaux qui durent longtemps, et des parties distinctes. Le ghazal est dans le registre semi-classique, car il est à la frontière entre classique et populaire.

En même temps, cest aussi par commodité que l'on emploie ce terme. Dans les faits, le genre semi-classique permet aux musiciens classiques de se donner une plus grande liberté, et à l'inverse aux musiciens populaires d'aller plus loin. Comment s'intègre la danse dans le groupe et dans la musique ?

Benafcha : La danse fait partie intégrante de la musique populaire afghane. Dans les rassemblements, elle est présente, que ce soit dans le monde des hommes ou celui des femmes, qui sont relativement distincts en Afghanistan. Dès quil y a du rythme dans la musique, les gens participent. Cependant, elle nest pas académique, il ny a pas décole, comme pour la danse indienne par exemple. Cest vraiment dans un premier temps une expression corporelle, et par la suite une inspiration personnelle, que ce soit chez les hommes ou les femmes.

Personnellement, mon inspiration personnelle se situe dans les musiques populaires et la danse du Nord de l'Inde. Je ne l'ai pas apprise, je danse depuis toute petite.

Quand je suis entrée dans le groupe, jai essayé d'aller plus loin, je danse sur n'importe quel morceau. Il n'y a pas une danse liée à un morceau, elle est différente à chaque fois, et elle est fonction du morceau, des paroles, de linspiration du moment. Quels sont les projets du groupe ?

Nous avons surtout le souhait de jouer souvent et beaucoup. En tant que groupe, nous avons des propositions de collaboration avec d'autres groupes à développer. Chacun séparément joue dans d'autres groupes, et développe des projets de son côté.Nous avons déposé une demande officielle pour aller jouer à Kaboul pour le nouvel an afghan, au mois de mars. Le projet est lancé, il reste à confirmer. Propos recueillis par PDJ Contact Shams :

Bruno Jacquet

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