Des cordes et des baguettes
Concert de Shivkumar Sharma le 15 octobre Salle Molière organisé par La Musique des Autres.

Jugalbandi, récital de danses de Bharata Natyam,Kuchipudi, Mohimi Attam, le 12 novembre Salle Paul Garcin (Lyon 3ème) dans le cadre des 4ème Nocturnes Indiens. Entretien avec Pascal Burianne "La Musique des Autres" Pascal Burianne : L'Association La Musique des Autres a été créée en 1993. J'ai créé cette association parce que je me suis aperçu que, sur la région lyonnaise, sur les scènes lyonnaises présentant de la musique traditionnelles, la musique classique indienne ou folklorique populaire n'était pas très fortement représentée.

Ayant habité ce pays pendant presque deux ans, ainsi qu'au Népal et au Sri Lanka, je me suis dit que j'allais mettre à profit mon expérience de terrain. On a immédiatement débuté un premier concert en décembre 1993 avec des musiciens du Rajasthan accompagnés de la danseuse Gulabi Sapéra qui a travaillé avec, entre autre, Thierry Robin sur ses précédents disques, et Ahmeed Khan, joueur de tabla également indien du Rajasthan qui a aussi participé à des expériences musicales avec Thierry Robin et Eric Marchand. Nous avons aussi programmé Hariprasad Chaurasia (flûtiste), El. Subramaniam (violon), ou encore N. Ramani (flûte)... L'association a deux objectifs : d'une part l'organisation de concerts ou de récital de danses de musiques traditionnelle, en particulier spécialisés dans la culture indienne. Deux concerts en moyenne par an avec si possible des grands noms de la musique classique indienne, parce qu'en découvrant tout de suite des grands virtuoses, il y a une accessibilité auditive plus facile et plus agréable.

Nous souhaitons pour l'avenir, faire venir des concerts de moindre envergure au niveau de la notoriété des musiciens, en proposant toujours trois à quatre fois par an "des grosses pointures". D'autre part nous emmenons des groupes sur des voyages culturels avec des thématiques axées sur la chorégraphie, sur l'architecture, sur la musique, sur la statuaire, sur la religion...

Ce sont des voyages de quinze jours, et parfois de trois semaines. La souplesse d'une association qui présente des voyages, c'est de privilégier des groupes d'intimes ou de familles, et aussi de faire des voyages à la carte, : si une personne veut un thème en particulier, ou un parcours en particulier, nous l'étudions et nous lui faisons une proposition, un devis. Ce sont donc des groupes restreints qui ne dépassent pas en général huit à dix personnes. Ces voyages sont accompagnés par Gilles Guillot, guide depuis une douzaine d'années en Inde, qui connaît donc parfaitement le terrain et son sujet . CMTRA : Ce sont en quelque sorte des safaris culturels : cette initiative existe-elle depuis le début ?

P.B. : Non, cela s'est greffé dans une envie de développer l'association, et de dire que l'on ne présente pas uniquement des concerts, on propose aussi à nos spectateurs de venir voir directement dans le pays ce qu'ils ont vu sur scène à Lyon. C'est plus passionnant, on les emmènent voir des festivals, des luthiers, on leur montre comment on enseigne la danse, comment on enseigne la musique, quels sont les rapports entre un enseignant et un élève ... On est reçu chez des amis puisqu'on a de nombreux amis dans ce pays.

Parfois, on va dans des lieux beaucoup plus reculés, en dehors des sentiers battus, ce qui signifie qu'il n'y a pas forcément une structure d'accueil au niveau du tourisme, donc on prévient bien les gens sur la modestie des couchettes. Cette précarité n'enlève pas la beauté de ces endroits retirés. Le festival Les Nocturnes indiens» (4ème édition) c'est en fait l'association Asiexpo essentiellement régit par Jean-Pierre Giménez et Martine Furnion. Asiexpo a toutes les capacités à s'organiser pour le cinéma, les conférences, les expositions et les spectacles pour enfants, par contre depuis maintenant deux ans, elle confie à La Musique des Autres l'organisation des spectacles de danse et de musique. Cette année La Musique des Autres présente le jeudi 15 octobre, le concert de Shivkumar Sharma, musique hindoustanie, musique (vivante) classique de l'Inde du Nord. La musique hindoustanie puise dans l'ancienneté des traités écrits. D'après les Puranas, le dieu Shiva, antérieur à la culture aryenne, enseigna aux hommes la danse et la musique, 6000 ans avant notre ère. La musique classique indienne se développe sur la base du Sama Veda. Le sage Bharata codifia cette musique, il est l'auteur du Natya Shastra, ouvrage sur la théorie musicale. La musique hindoustanie nous donne à écouter des récitals très contemporains de son temps. C'est une musique classique et vivante, car non figé. La musique hindoustanie vit avec le temps qui passe et ce depuis des milliers d'années. Elle se renouvelle en référence à ses bases théoriques. Cela lui permet d'être toujours différente donc attractive, d'un concert à l'autre. En ce sens, elle est à part entière &laqno;une musique vivante». Sa richesse d'improvisation (ce qui est presque sa définition) est en fait une musique évolutive en une perpétuelle dimension progressiste. Capable d'adaptabilité à son temps sous des aspects sociaux, les exigences techniques des concerts, de la radio, studios etc, elle s'adresse dès lors à tous et non pas aux castes privilégiées.

Elle a su adopter des instruments qui jusque là lui étaient étrangers. Des instruments européens comme le violon, puis la guitare, la mandoline ou même le saxophone. Dans l'intégration de nouveaux instruments, Shiv Kumar Sharma est le musicien qui a fait accepter le santour comme instrument noble dans l'interprétation de la musique classique. L'interprète vit une expérience unique à chacune des versions qu'il nous propose d'un Raga. A chaque concert le musicien découvre d'autres jeux musicaux. Il nous fait partager son sentiment par le vecteur de la musique qui est un outil pour son esprit. Shivkumar Sharma né à Jammu au Cachemire. Très jeune il apprit le chant, puis les Tabla, le luth Sarod, le Violon et l'Harmonium. A quatorze ans, son père a commencé à lui transmettre ses propres recherches au Santour. Dans la musique traditionnelle du Cachemire, l'usage du Santour était restreint par le passé à un répertoire toujours en vigueur, dénommé Sufiana Kalam (le chant des soufis). Il s'agit d'un répertoire mystique influencé par la culture persane. Le Santour n'avait qu'un rôle secondaire: il se contentait d'accompagner le chant. Alors que le jeune Shivkumar Sharma était attiré par la musique savante de l'Inde, l'ancienne facture de l'instrument rendait inapte son voeux. Il entreprit donc des transformations techniques. Il dota le Santour de cordes chromatiques absentes à l'origine et il porta son étendue à trois octaves.

On lui doit d'avoir inventé des procédés subtils d'attaque de la corde. En dehors de la frappe de la baguette sur la corde, qui est le moyen de la faire vibrer et de produire le son, Shivkumar Sharma ajoute le frottement de la baguette sur la corde, il s'ensuit une sonorité plus intériorisée. Il utilise le pizzicato, qui consiste à attaquer les cordes en les pinçant avec les doigts. Enfin dernière innovation, il applique la paume de sa main gauche sur les cordes afin d'en amortir les résonances. En 1955 il fait ses début lors d'un concert à Bombay. Il élève le Santour au rang d'instrument de scène en adaptant les techniques hindoustanies. C'était le premier récital de Khyal (style classique hindoustanie). Le monde de la musique savante l'accueillit avec chaleur et ouvrit ses portes à ce nouvel instrument. Shivkumar Sharma est un véritable révolutionnaire du Santour. Pour la première fois en France, Shivkumar Sharma joue en compagnie de son fils et élève Rahul Sharma. Le père et le fils se complètent avec un bonheur consommé. Rahul Sharma a d'ailleurs du répondant . Il fait preuve d'initiatives mélodiques et rythmiques à chaque fois qu'il doit répondre à son père dont il n'est pas le simple écho. Les instruments et musiciens Shivkumar Sharma : Santour. D'origine iranienne, c'est une caisse de résonance en forme de parallélépipède sur lequel une centaine de cordes sont montées. On les attaque avec deux baguettes. On trouve la trace du Santour dans les écrits sumériens et araméens. S'il fait partie des orchestres classiques iraniens et irakiens, c'est depuis l'Inde que les tziganes l'ont introduit en Europe sous la forme de cymbalum. Rahul Sharma : Santour. Saafat Ahmed Khan : Tabla. Percussion composée de deux timbales. Le tabla en bois se frappe de la main droite, le baya métallique se frappe de la main gauche et donne la cadence. Christian Ledoux : Tampura.. C'est un luth à 4 cordes jouées l'une après l'autre. Il sert à donner un accord de fond. Les 4ème nocturnes indiens Asiexpo et la Musique des Autres présentent, le jeudi 12 novembre, salle Paul Garcin, Jugalbandi, récital de danses : Bharata Natyam - Kuchipudi - Mohini Attam : Le Jugalbandi est une réunion, une combinaison d'artistes mélangeant leurs styles et connaissances afin de donner forme à une nouvelle expression musicale où chorégraphique. Le Jugalbandi est pratiqué communément dans la musique classique indienne, c'est beaucoup plus rare pour la danse classique. A observer la danse classique indienne, on assiste à un récit, un conte, une légende où un mythe. Ces danses sont des mises en scène de ces narrations. B. Balathiripurasundari danse le Kuchipudi : Le Kuchipudi est un style de danse dramatique, mis au point au XVIème siècle dans le village de Kuchipudi et ses alentours en Andhra Pradesh.

Elaboré par des brahmanes pour illustrer à travers de véritables drames dansés la mythologie vishnouite et honorer Krishna. Ce style tout en s'inspirant de la grande tradition de l'art dramatique, n'en décèle pas moins l'influence des spectacles populaires. L'expression véhiculée par le vocabulaire gestuel et le jeu du visage rend ce style vivant, plus apparenté à du théâtre dansé qu'à de la danse pure. De nos jours, le Kuchipudi se pratique également en solo. J. Surya Narayana Murthy danse le Bharata Natyam : Danse religieuse du Sud de l'Inde et qui aurait gardé sa pureté depuis l'époque où elle aurait été créée par Bharata. Elle se pratiquait dans les temples en l'honneur de Shiva par des danseuses professionnelles attachées au temple, les Devadasis.

Les mouvements et les phases du Bharata Natyam obéissent à des rythmes (tala), transmis de père en fils par des Natuvanar ou &laqno;maître de danse». Les Tala, actualisés par des syllabes sans signification propre, traduisent les rythmes et les mouvements que doit observer la danseuse.

Au XIXème siècle, les Natuvanar de la famille des Pillai ont codifié les séquences, leur nombre et leur ordre. &laqno;Là où la main se trouve les yeux doivent être; là où les yeux vont, l'esprit doit suivre; et l'objet vu en esprit doit apporter le sentiment approprié, car en lui gît le sens de l'action». Nandikeshvara. Anita Ramchander danse le Mohini Attam : Ce style de danse se pratique dans le sud de l'Inde, au Kerala. Autrefois exécuté par des hommes, il est actuellement interprété par des femmes en solo.

Cette danse extrêmement raffinée requiert de la part de la danseuse une grande souplesse et beaucoup de grâce. Les mouvements tout en courbes sont empreints d'une grande douceur. Les sentiments expriment principalement l'amour et la dévotion. Autrefois pratiqué dans les temples, le Mohini Attam appartient à la tradition classique des danses sacrées tout comme à la tradition populaire des danses collectives rituelles. Ce Jugalbandi est présenté pour la première fois en France. Le spectacle est ponctué de solos de chacune de ces danses et de combinaisons des 3 styles. L'orchestre qui accompagne la danse est constitué d'un flûtiste, d'un percussionniste au Mridangam (tambour classique en bois à double face), ainsi que d'un joueur d'Edaka (percussion du Kerala).

A la tête de cette formation, il y a le Natuvanar. Son rôle est très important pour la direction du récital. Narasimhachari participera comme Natuvanar (chanteur du Nattuvangam). La Musique des Autres accueillait Narasimhachari en 1994 à l'occasion d'un spectacle de Bharata Natyam avec sa femme et ses deux filles. Nous en avons conservé un excellent souvenir. Le festival Nocturnes Indiens c'est aussi des films, des expositions et des conférences. Le festival Nocturnes Indiens c'est aussi des films, des expositons et des conférences, à Lyon, Grenoble et Genève du 12 au 29 novembre. Contact :

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