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Mémoires vives







Visite au cœur de l'hiver à Anost, petit village du Morvan en Bourgogne, pour une rencontre avec Mikaël O'Sullivan, documentaliste et conteur au sein de l'association Mémoires Vives. Mikaël O'Sullivan : Au début, il y a eu Lai Pouèlée, un collectif qui s'est inscrit dans le mouvement du revival des années 1970. Ils étaient très éclectiques et s'intéressaient à la langue, à la musique, à la danse mais aussi à l'architecture, à la nourriture... De toutes ces recherches ont émergé plusieurs associations animées par des préoccupations culturelles et économiques avec un souci d'engagement militant pour la relance des pratiques de traditions populaires. Parfois c'est avec une partition que l'on relance un répertoire. Là c'est directement les anciens qui ont appris à jouer aux personnes qui voulaient pratiquer les instruments. Ça a duré de 1980 à 1990, et puis à cette période beaucoup d'anciens sont partis. CMTRA : Tu parles de préoccupations militantes, y'avait-il derrière ce travail de collectage et de valorisation des cultures populaires du Morvan un projet revendiqué ?

Par militant, j'entends une farouche volonté d'indépendance, par exemple ils ont refusé les subventions publiques. Ils voulaient se débrouiller par eux-même et s'organiser à leur manière. Ils n'ont pas fait d'éditions de prestige mais en revanche ça leur a permit d'avancer rapidement dans un travail de production de qualité. Si on parle de reconnaissance sur le terrain, ils ont fait un travail remarquable qui nous sert encore tous les jours. Lai Pouèlée, les gens d'ici connaissent puisqu'ils ont tous été à un moment à une veillée qu'ils avaient organisée, ou parce qu'ils ont eu entre les mains une production de l'association (livres, 33 tours, almanachs...). Lai Pouèlée a pris fin en 1998 et peu à peu, l'UGMM (Union des Groupes et Ménétrier du Morvan) a pris de plus en plus d'ampleur avec l'organisation de la fête de la vielle qui accueille chaque année 15 000 personnes, la mise en place de stages, de rencontres, la continuation des collectages sur le terrain. En 1995, Mémoires Vives est né avec pour objectifs la collecte, l'archivage et la valorisation du patrimoine ethnologique du Morvan et de ses environs. Ces objectifs étaient déjà ceux de Lai Pouèlée et de l'UGMM, mais à chaque fois cela avait dérivé vers la publication ou l'organisation de manifestations. Les archives, c'est bien connu, on peut toujours remettre ça au lendemain. Nous avons donc commencé par rassembler les collectes réalisées et par traiter les bandes qui avaient été stockées dans de très mauvaises conditions. Vingt ans après, cela devenait vraiment urgent de traiter les fonds. Quel est le rôle de la phonothèque dans cette chaîne de transmission qui lie les anciens, les collecteurs, et le public qui s'intéresse aux cultures de tradition orale ?

C'est un lieu de conservation, un lieu de ressources et un lieu de transmission. Nous avons ici de la musique (accordéon diatonique, vielles, violon, cornemuse), des contes (anecdotes, légendes), et des récits de vie. Notre rôle consiste donc avant tout à en assurer la conservation. Et puis nous avons un lieu ouvert au public, où les documents sont accessibles facilement, de plein-pied, pas dans une cave, ni un grenier. Un effort a été fait sur la présentation des documents, ils donnent envie d'être écoutés, d'être regardés. Et puis aussi il y a des gens sur place, formés pour en assurer l'accès et la transmission.Ce qui m'intéresse à Mémoires Vives, c'est que les éléments collectés sont là comme une matière qui nous sert à agir, à rencontrer les gens. Ils passent à travers nous. C'est à l'occasion des interventions pédagogiques ou des veillées qu'ils sont restitués, et qu'ils reprennent vie. Le centre de documentation n'est qu'un lieu de passage. Nous organisons des stages de formation au conte à l'intérieur du centre de documentation, au cours desquels un récit de vie puisé dans le fonds peut inspirer un conte, par exemple. Ensuite on déplace le centre de documentation sur les fêtes ou sur les ateliers de pratique musicale. Je montre des films, je fais écouter des morceaux, tel et tel répertoire, des partitions. En général, j'élargis, je parle des savoirs-faire, je leur montre des films sur les bœufs, sur le déclin du monde paysan, je remets les éléments dans le contexte et j'essaie de les mettre en perspective. Si ce sont des ateliers de vielles ou de violon, je fais écouter les répertoires d'autres régions de France, ce qui se fait aujourd'hui dans le domaine de leur instrument. Des veillées sont aussi assurées par les bénévoles de l'association ...

Une dizaine de bénévoles participent activement à l'activité de l'association en participant à des veillées conte-chant-musique. Ils viennent chercher du répertoire dans le fonds documentaire : anecdotes, contes, chansons qu'ils s'approprient et qu'ils restituent ensuite en veillées ou en interventions dans les écoles ou les maisons de retraite. On rend ce qu'on nous a donné, et souvent à cette occasion des gens nous apportent des nouvelles histoires qui viennent enrichir le fonds. Quelle est l'utilité d'une réécoute des archives pour les pratiques contemporaines des instruments traditionnels ?

En général, je commence à leur faire écouter le Chaicrot, un joueur de vielle à roue qui a joué jusque dans les année 60. Les documents d'archives comme celui là sont importants pour nous faire sentir combien la manière de jouer et le son ont changé. Lorsque l'on écoute cet extrait, on se heurte à un son épais, puissant et tendu. Pour faire le même son aujourd'hui, il faudrait un amplificateur. Aujourd'hui les gens jouent à l'image du professeur, ou tendent vers une volonté plus esthétisante, l'envie de faire de « belles choses », le son est plus rond. A l'époque du Chaicrot, il n'y avait pas cinquante modèles, il y avait peut-être le musicien du coin, c'est tout. Ils étaient beaucoup sollicités. Les filles et les gars avaient envie de danser alors le musicien devait apprendre rapidement, c'est ces moments qui forgeaient les styles. Aujourd'hui les gens sont déconnectés du contexte. On ne sait pas très bien d'où les morceaux viennent, où ça va... Ce n'est pas un problème en soit, ça gêne personne. Mais le jour où les gens viennent à l'atelier de Mémoires Vives, ils sont contents de se rendre compte lorsqu'ils jouent la valse à Clément, que finalement Clément, c'était une personne, avec son histoire, son style et un son forgé par l'expérience. Cette valse prend plus d'importance et de raison d'être car ils découvrent par quel biais elle est arrivée dans le répertoire. Les gens ont peu l'habitude d'aller consulter du son, Internet te semble-t-il être une solution pour l'avenir des archives sonores, pour leur propagation auprès d'un public plus large ?

Parfois je rêve que tout soit au clair et au propre, et que tout soit disponible sur Internet pour que tout le monde en profite et trouve instantanément ce qu'il cherche, la polka du père machin, les scottish du Dédé... Qu'ils tapent sur Google et hop... Mais il manquera une dimension : la rencontre. Pour moi, cette notion de rencontre, ça colle à l'archive sonore, et d'autant plus lorsqu'il s'agit de musiques traditionnelles en contexte associatif; la rencontre est là et elle est omniprésente. Qu'il y ait sur le net des infos et des documents accessibles à des chercheurs qui habitent à l'autre bout de la planète, c'est important mais il faut faire attention de ne pas déconnecter l'archive sonore des gens qui habitent le territoire. Si je suis à Mémoires Vives, c'est vraiment parce que l'on joue sur les deux tableaux, il y a une partie documentation et une partie animation, et les deux fonctionnent ensemble. Qu'est ce que tu trouves dans la musique traditionnelle que tu ne trouves pas dans les autres musiques ?

La convivialité. C'est un contexte qui fonctionne très bien pour créer un échange. Que les musiciens soient débutants ou pratiquants depuis de très longues années, il y a un répertoire commun. Il y a tout de suite ce partage de la musique qui est facile, immédiat. Ensuite c'est une musique qui est accessible. Je suppose que les musiciens de musique classique peuvent aussi mettre en commun leur répertoire, mais c'est déjà moins facile à aborder comme musique. C'est vrai qu'elle est parfois jugée simpliste cette musique traditionnelle, parfois un peu répétitive. Mais je trouve qu'elle laisse la possibilité aux gens de se l'approprier assez rapidement. Elle laisse énormément de liberté à l'interprétation, et donc à l'expression de la personnalité. Là encore, il est important que le centre documentaire soit là pour rappeler aux gens la liberté dont ils disposent avec ces musiques. Les anciens lorsqu'ils jouaient prenaient une liberté immense qui se manifeste par exemple dans la disparité des styles. Si tu prends trois accordéonistes qui ont été collectés dans les années 70, il n'y en a pas un qui joue pareil. Aujourd'hui dans les ateliers, le son, les styles se nivellent, les élèves ont plus de mal à trouver leur personnalité, à oser user de la liberté que leur laissent les musiques traditionnelles. Et puis enfin les musiques traditionnelles, c'est un rapport à la danse. Pour moi, c'est très important le rapport à la danse. Ce sont les danses de couple, les danses de groupes qui mettent les gens dans un climat d'échange. Avec les musiques traditionnelles, le plaisir est là, très vite les gens participent à un événement et ils sont acteurs. Dans nos petites régions rurales désertifiées, s'il n'y a pas d'acteurs de la vie culturelle, il n'y a rien. S'il n'y a que des consom-mateurs, il n'y a plus rien. Etre acteur, c'est quand même plus valorisant... Et pour le conte ?

Avec le conte c'est pareil, le conteur tisse une trame, construit un chemin, il y dépose des mots et les gens se servent de tout cela pour créer leurs propres images. Le conteur fait la moitié du chemin et les gens parcourent l'autre moitié. C'est à cet endroit-là, entre les deux, qu'il y a une rencontre, qu'un échange se fait. Dans un film, on livre la musique, les paroles et les images, les spectateurs n'ont plus qu'à consommer assis dans le canapé. Lorsque l'on conte, les gens sont obligés d'être attentif, on cherche sans arrêt l'équilibre. Propos recueillis par P.B. Contact

Mémoires Vives Mairie 71550 ANOST

Tel : 03 85 82 72 00 - Fax : 03 85 82 77 00

E.Mail : [memoires-vives@wanadoo.fr->memoires-vives@wanadoo.fr] -

[http://perso.wanadoo.fr/memoires-vives->http://perso.wanadoo.fr/memoires-vives] Catalogue livres et disques de l'UGMM : [http://perso.wanadoo.fr/ugmm/lien.htm->http://perso.wanadoo.fr/ugmm/lien.htm] Dates à retenir

Du vendredi 19 au dimanche 21 août

27e Fêtre de la vielle en Morvan Anost (71)


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