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Le café des musiques traditionnelles
Le Bartholdi

Les soirées flamenco organisées par le CMTRA au Bartholdi ont permis, depuis le début de l'année, d'enregistrer plusieurs ensembles de haut niveau, vivant dans l'agglomération lyonnaise, dans le cadre du CD Flamenco à Lyon que nous inaugurerons en septembre.

Pourquoi ne pas débuter chaque soirée par un débat public autour des musiques traditionnelles vivantes ? Une idée intéressante, chère à Monique et Marcel Ernst, nos hôtes du Bartholdi.
Entretien avec Monique et Marcel Ernst CMTRA : Le "Café des musiques traditionnelles"... Monique et Marcel, vous n'avez pas vraiment attendu le CMTRA pour vous intéresser aux musiques du monde à Lyon !?

Monique Ernst : Les musiques traditionnelles sont quelque chose à la fois de très vaste et de très fermé. Aujourd'hui énormément de groupes se réfèrent aux musiques traditionnelles, des groupes qui peuvent être les transcripteurs ou les traducteurs des musiques traditionnelles, à la fois dans le sens strict du terme, très proches des sources, en utilisant les rythmiques, les instruments, en essayant de retrouver les voix anciennes. Et aussi tous les groupes qui les retraduisent, ou qui les retranscrivent à travers des instruments plus modernes, avec d'autres types de communication...

Pour moi, au Bartholdi, ces deux styles de musiques appartiennent à la musique traditionnelle d'aujourd'hui. Nous sommes les collecteurs d'un état d'esprit vivant. CMTRA : Cet état d'esprit vivant des musiques traditionnelles est donc présent à Lyon et le Bartholdi serait une caisse de résonnance de ces musiques ? Qu'est ce qui vous différencie du réseau des bars de la Croix-Rousse ou d'ailleurs, et apportez-vous un plus ?

Monique Ernst : Je crois qu'il y a des choses intéressantes aujourd'hui sur les pentes de la Croix-Rousse : je pense au "Chanteclerc", je pense ici au "Barrel", en passant par "l'Inconnu", en passant par le "Bistroy", etc... Ce sont des gens qui ne sont pas des "gens de bars", et qui ont créé des bars, avec un désir profond de donner un espace à la musique vivante.

Des gens qui ont la volonté de faire passer cette musique, tout en étant un lieu de convivialité où l'on mange et l'on boit : c'est une espèce de chaîne assez extraordinaire qui provient, comme chacun des "pilotes" de ces lieux, de nos itinéraires personnels, et qui se traduisent par des identités différentes et cependant collégiales. Les uns et les autres, nous menons à notre manière, une action de culture vivante commune. CMTRA : Le Bartholdi et le CMTRA ont commencé à travailler ensemble pour des soirées Flamenco : On s'est appuyé sur un réseau, et la force de ces soirées reste de toucher ces réseaux spécifiques. Vous semble-t-il possible de travailler sur d'autres réseaux, avec peut-être d'autres genres musicaux ?

Monique Ernst : Je pense que c'était très bien de commencer par le Flamenco, qui est un genre très galvaudé. C'est dans un lieu comme le Bartholdi, qui peut faire peur à certaines expressions de la musique traditionnelle, que se sont passées ces extraordinaires soirées flamenco : et de pouvoir faire venir dans un lieu central, qui permet à une expression musicale de communiquer avec un public qu'elle n'a pas habituellement. Et l'envie que nous avons aujourd'hui, c'est de poursuivre cette aventure, en l'organisant avec ceux qui en ont la volonté.

L'autre thématique, que nous abordons est celle des percussions. On débute avec le groupe des "Tools", qui est une bonne introduction, puisque ce groupe n'est pas composé que de percussionnistes, mais de musiciens qui réfléchissent autour de la notion de "rythmique". Tout le problème de ces musiques c'est qu'elles sont souvent enfermées dans des genres cloisonnés par des publics. Et nous, si par une analyse et par une présentation qui fait exploser le genre, on montre comment cette "rythmique" s'inscrit dans l'histoire de la musique,de la plus populaire à la plus classique, on a absolument tout gagné. CMTRA : Après plusieurs hésitations, nous avons décidé d'ouvrir chaque soirée par un débat public autour des musiques du Monde, inaugurant une sorte de "café philo" de la parole musicale. Marcel, croyez-vous à la réussite de ces débats publics ?

Marcel Ernst : Il y a plusieurs idées parallèlles. La première, c'est que les musiques traditionnelles ne sont pas "inconnues", mais "méconnues". Elles sont vues à travers des idées toutes faites. Pourtant il y a tout un travail qui a démontré qu'elles avaient une extraordinaire créativité, une énorme capacité de variation, et une force, une puissance qui est hors norme.

Au Bartholdi, nous avons l'habitude des débats. Tous les débats ont démarré de la manière suivante : ils sont tissés sur ce qui est le sous-titre du café : "l'ouverture d'esprit". Depuis des années, nous nous intéressons à énormément de phénomènes d'expression culturelle, ce qui nous amène à une ouverture d'esprit que l'on veut partager. À partir de là l'importance n'est pas tellement le thème du débat, mais plutôt la capacité d'amener vers une compréhension de ce qui est l'esprit des hommes... et de ce qu'on peut faire à partir de cette réflexion. Une action qui s'appuie sur l'esprit des hommes du commun, c'est-à-dire de nous tous.

Il y a les hommes qui sont des spécialistes qui se retrouvent entre eux, qui ont leur lieu, ce qui est tout à fait nécessaire et utile par ailleurs. Et puis il y a des personnes qui ne sont pas des spécialistes d'un domaine, mais qui ont besoin d'avoir en face d'eux quelqu'un en chair et en os, qui puisse donner des ouvertures, des clés pour comprendre tel ou tel domaine. Les cafés ne sont physiquement pas les lieux ou normalement devrait se dérouler ce type de dialogue, et c'est paradoxalement le seul lieu où cela peut se passer. Parce qu'il y a du brouhaha, parce qu'il y a des machines qui fonctionnent, des gens qui bougent et parce que c'est aussi un lieu où la liberté de parole est plus grande, ou l'intervention est plus légère, et ou les rencontres non programmées sont les plus fréquentes... Et d'autres part les mélanges de professions, d'intérêts et de sensibilités sont les plus larges. Il faut qu'il y ait quelque part des hommes qui ont envie de créer un lieu de rencontre culturelle pour que ces atmosphères existent.

Alors, il y a les cafés, qui restent des débits de boissons, et qui peuvent être aussi des débits d'esprit, de paroles, de musiques... ou tout se mêle... et où le dialogue peut s'instaurer pour peu qu'on le veuille. CMTRA : Quelques pistes de débat autour de la notion de "musiques traditionnelles", pour le 29 avril prochain ?

Marcel Ernst : Je voudrais revenir sur le fait que les gens qui sont impliqués dans ce travail de Revival, jouent un rôle non seulement utile pour la musique, mais pour le pays lui-même. Tout simplement parce que là où on est, là où on a vécu, il y a des hommes qui vivaient avant, et qui ont constitué une culture pendant des générations et des générations. Et de même qu'ils nous ont légué des villes, des architectures, une langue, ils nous cèdent différentes musiques, différents sons organisés, à nuls autres pareils, et si je suis sensible à toutes les musiques qui viennent de traditions, je suis aussi sensible à celles qui sont nées à proximité de là ou je vis. Et il y a un certain nombre d'hommes et de femmes que je connais, qui ne sont pas venus de milieu rural, mais d'universités, ou de différents itinéraires. Et pour plusieurs raisons ils ont été sensibles également à ces phénomènes. Et au moment où tout allait s'effondrer dans les mémoires, ils ont réussi par un travail qu'ils ont poursuivi intelligemment, à récupérer non seulement ces musiques, mais aussi l'esprit de ces musiques.

Par cette espèce de variabilité, d'invention, ils se sont autant opposés à leur oubli qu'à leur déformation d'esprit. Et ces hommes restreints ont fait ce travail dans des conditions d'engagement personnel très fort, avec des capacités d'intelligence et d'humanisme que j'estime beaucoup. Pour qu'on les prenne en considération, il ne suffit pas qu'il y ait de la musique qui existe, mais il faut qu'il y ait aussi du sens à donner à cette musique.

Cet enjeu, c'est celui de notre génération, qui est, une génération "d'articulation", entre un monde qui va demain être mondialisé, et qui l'est déjà en partie, d'une rapidité extraordinaire, un monde où les concentrations d'activité, aussi bien celle de l'économie que celle de la musique vont se retrouver liées à des règles aveugles de fonctionnement. CMTRA : On voit dans le débat politique comment le Front National essaie de kidnapper l'idée de tradition, en la réduisant à un symbole de "conservation". Et curieusement, une partie du discours intellectuel "de gauche" se fait piéger lui aussi, retournant la notion de tradition à l'extrême-droite. Ne pensez-vous pas qu'il est temps de réagir sur la réversibilité de ces valeurs, et sur l'universalité des "musiques traditionnelles" ?

Marcel Ernst : Je crois que la musique traditionnelle, comme toute notion quelle qu'elle soit, est une notion qui a toujours son ambiguïté. Mais ce que l'on peut puiser dans les musiques traditionelles c'est le dynamisme d'une expression créée continuement par des groupes d'hommes au fil du temps et de l'espace. Il faudrait d'abord se demander où se situe la musique traditionelle, d'où vient-elle, à quoi elle répond. Il s'agit là d'un phénomène général de l'espèce humaine, de l'émergence expressive de groupes restreints vivant en autarcie, et se ressoudant, se réchauffant l'âme et le corps dans une expression partagée. Mais toutes ces formes musicales n'ont jamais été totalement arrêtées. Elles ont eu une vitesse de modification au fur et à mesure des créativités puisqu'elles étaient de structure orale, laissant place à la variabilité des personnes et du temps. Ce que l'on voit bien dans le cadre stylistique de toutes les modes d'expressions : musiques, langue, arts plastiques, vêtements, parures, etc...

On peut mettre l'accent sur n'importe quoi, sur la créativité, sur la continuité du groupe, bien sûr, mais aussi sur l'idée d'un groupe qui ne bouge pas, on peut mettre les frontières autour de son identité. Mais alors, on évacue cette sensibilité réelle et profonde du vivant. On ne retient que les formes apparentes qui permettent de produire un alibi, une idéologie, au service de cette cohésion figée et mythique. Et l''on n'a pas créé ou recréé cette espèce de joie communautaire qui se retrouve dans une expression de qualité. On utilise des formes, on n'exprime plus.

Le verso de l'art Roman ou de l'art populaire, c'est l'art Saint-Sulpicien, le meilleur devient creux, non plus fondé sur un dialogue des réelles sensibilités partagées propices à des variabilités de créativité mais sur des shématisations formelles "désensibilisées". On évacue cet espace de complicité, d'effusion communautaire de la personne expressive et de sa résonnance dans l'âme. Toute la modernité et la différence de notre action doit-être percue dans cette prise de parole autour de valeurs collectives fortes, qui sont des valeurs de liberté. Contact :

Bartholdi

6, place des Terreaux 69001 Lyon

Tél : 04 72 10 66 00


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