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Fiscalité et droit du travail
contre la culture et l'expression

Par Pierre Saccoman* En ce moment, de nombreuses équipes culturelles, surtout gérant de "petits lieux" se trouvent confrontés à des contrôles administratifs musclés et menacées ou condamnées à de très lourdes amendes ou autres redressements fiscaux... La loi est la loi et la même pour tous, certes, mais pourquoi en arrive-t-on là ?

Pourquoi maintenant ? Y a t'il d'autre alternative qu'entrer en illégalité complète ou fermer ? Depuis toujours, comédiens, musiciens, bateleurs ont appris à vivre "à côté", "en marge" : quel musicien n'a pas fait la manche dans la rue, n'a pas travaillé "au noir" dans des bistrots, des restaurants ? Quelle équipe, quelle compagnie, quel groupe, pour vivre, pour s'acheter du matériel, n'a pas accepté de mettre tout l'argent gagné dans un pot commun ? Quelle association, quel petit lieu n'a jamais demandé à des professionnels de jouer gratuitement pour acheter ou louer un lieu, réaliser des travaux, faire des aménagements ?

Jusqu'à présent, la "loi" a fermé les yeux, on a laissé faire parce qu'on avait affaire à des équipes modestes, à des "débutants", à des M.J.C., des équipes intervenant dans des quartiers difficiles, à des expériences plus ou moins marginales, ou des expressions ne faisant pas la "une" des médias : théâtre expérimental, musique traditionnelle, jazz... Oui mais voilà : la culture est devenue un enjeu politique : les collectivités locales se sont précipitées pour créer des structures, financer, des opérations médiatiques, des sommes énormes ont été allouées. Le système "Lang" par exemple, qui a favorisé et développé une culture élitiste, des opérations "branchées". C'est ainsi que se sont multipliés les gros équipements, les institutions dont les budgets pharaoniques "pompent" les finances locales, donc les impôts des citoyens, et laissent de côté des milliers de groupes, d'équipes et de petites structures de quartier, d'initiatives proches du public, qui en sont réduits au bricolage, aux budgets de bout de ficelle pour survivre...

Or, de plus en plus, on assiste à un phénomène nouveau : des milliers et des milliers de personnes cherchent des voies d'expression, veulent faire du théâtre, de la musique, de la danse, désirent des spectacles "proches", accessibles financièrement, dans des lieux conviviaux, en dehors de la sacralité des institutions : de partout naissent des équipes dites "amateurs", des associations, des petits lieux, sans moyens matériels, sans aucune fortune que le dévouement et le travail bénévole... Le besoin des petits lieux, des salles de "proximité" fait que des milliers de comédiens et de musiciens professionnels vivent désormais (difficilement)de ce secteur et grâce à l'existence de ces petites structures... Vu leur succès, l'afflux de participants, ces lieux deviennent visibles et là, les problèmes commencent : certains professionnels, plus proches du système maffieux que de la réelle expression culturelle s'émeuvent et les dénonciations apparaissent : ces lieux font du bruit, utilisent des locaux sans sécurité, les artistes ne sont pas payés, ils ferment tard, ils sont moins chers, font de la concurrence déloyale, etc. D'après l'inspecteur du travail, dès qu'une soirée est payante et qu'il y a eu publicité, il s'agit d'une opération commerciale et lucrative et toute personne y travaillant, même si elle s'affiche bénévole doit être payée : aussi bien les comédiens et musiciens que les personnes qui tiennent les entrées, la buvette, font le ménage... On demande des contrats de travail en bonne et due forme ! Les présidents ou responsables de ces structures sont menacés de lourdes amendes pour infraction au droit du travail et présomption de salaire déguisés...

On a tenu une buvette, on a fait de temps en temps un repas, on s'occupe de temps en temps de la billetterie : on croit être bénévole et se dévouer pour un projet, PAF ! Il faut payer les charges sociales à l'URSSAF et aux ASSEDICS car on a sûrement touché des dessous de table... Pour l'inspection des impôts : on croît être association, avoir des soirées et une buvette réservée aux adhérents... que nenni : des cartes d'adhésion trop peu chères sont des entrées déguisées : hop !, aboulez l'impôt sur les sociétés et la TVA depuis 1994 ! Les sommes réclamées sont énormes...

Donc, après des années et des années d'expériences de combats culturels, on apprend que tout ce qui a été fait était en complète illégalité. Illégal le dévouement, le bénévolat pour un projet culturel ! Illégal le fait que pour pouvoir exister certaines expériences ont besoins d'activités dites rentables pour continuer... Illégal le fait que des musiciens, comédiens danseurs professionnels prêtent leur concours à des projets, des équipes ou des lieux originaux ! Si nous laissons faire, seuls auront droit à l'existence des artistes et équipes déjà "reconnus" pouvant se produire dans des institutions et des équipements labelisés, confirmés voire aseptisés... " Toute licence en art " proclamait Breton en 1938 dans le manifeste de la FIARI Veut-on couper les ailes de ceux qui cherchent et ouvrent des voies ?

Qu'adviendra-t'il de la vie culturelle en général, de l'art si on laisse mourir les petits lieux qui servent de tremplin, de banc d'essai aux professionnels du spectacle comme aux amateurs ? Qu'adviendra-t-il des professionnels si on supprime les endroits qui leur permettent de réaliser des expériences, de jouer, de réaliser ces fameux 43 cachets-sésame obligé de leur statut-de vivre en somme... Va-t-on sonner le glas de la culture pour tous et de l'éducation populaire ? Tout ceci ne se passe pas dans une planète lointaine, mais bien chez nous, aujourd'hui ! Et comment croire les discours de responsables politiques sur la "fracture sociale", "la culture pour tous", "la citoyenneté" s'ils ne se prononcent pas fermement contre une logique implacable : nous attendrons des actes et pas des discours... À Grenoble, une trentaine de structures, d'équipes et de petits lieux se sont déjà constitués pour agir et se défendre. P.S. * Pierre Saccoman est Président de l'ADAEP



Contact : Association pour le Développement des Arts et Expressions Populaires

163, cours Berriat 38000 Grenoble

Tél : 04 76 96 55 88 L'ADAEP, qui existe maintenant depuis 22 ans et se bat pour le développement du théâtre pour tous, de la musique et de la danse traditionnelle, de la formation, la réflexion, la diffusion du spectacle a déjà connu des expériences cruelles : expulsée de son local en 1994, elle a réussi grâce au dévouement de ses adhérents à acheter et équiper sommairement un lieu.

Aujourd'hui, elle est poursuivie par un inspecteur du travail particulièrement délirant, soumise à un redressement fiscal impressionnant, poursuivi par le propriétaire de son ancien local (un milliardaire héritier Terray) pour des augmentations de loyer de 275 000 F soi-disant impayé, en fait jamais réclamée...

Dans cette situation très précaire : les salaires de février n'ont pas été payés, refus de la DRAC de recevoir l'ADAEP pour parler de ses problèmes malgré une lettre de Catherine Trautmann, pas de subvention exceptionnelle pour sauver la situation de la part de la mairie de Grenoble ou du Conseil Général de l'Isère...


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