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Devant les montagnes de feu

Entretien avec Marc Loopuyt Voyageur, poète, Marc Loopuyt ne conçoit la pratique d'une musique que par l'immersion dans le monde d'origine. Après l'Espagne, le Maroc, le Yémen, il vit depuis quelques mois en Azerbaïdjan. Quelques mots avnt son concert très attendu à l'Amphithéâtre de l'Opéra. CMTRA : Marc Loopuyt, que vois-tu de ta fenêtre ?

Marc Loopuyt : Je vois la mer Caspienne, car je suis à Bakou, capitale de l'Azerbaïdjan, entre le Daguestan et l'Iran. C'est la troisième fois que je viens ici, sans les tanks dans les rues cette fois. C'est une ville cosmopolite, qui a longtemps fait partie de l'empire perse et qui fut tour à tour sous influence russe ou persane. C'est plus une résidence qu'un voyage, à la fois un projet de création artistique, et un projet plus personnel.

Ici, pendant la période soviétique, les artistes étaient protégés : il y avait des écoles de musique partout, qui ont d'abord essayé d'enterrer cette tradition, et qui voyant que c'était impossible, ont essayé de la faire fonctionner dans le "bon sens" politique : on a essayé de faire rentrer le "mûgam" dans l'opéra, d'académiser l'aspect savant de la musique azérie. Cela a engendré un phénomène assez intéressant, "l'Opera Mûgam" :

un opéra sur un thème classique, par exemple l'impossible amour, traité avec deux styles de musique en alternance : l'opéra symphonique de l'école russe, et des passages qui relèvent du mûgam, donc de la musique traditionnelle. On y entend le târ , le kemantché et le tambourin, et un chanteur qui change de style en fonction des passages. Ces opéras peuvent durer 4 heures CMTRA : Peut-on parler ici de musique populaire ou de musique savante ?

M.L. : Il s'agirait dans ce cas-là de l'addition de deux musiques savantes. Ici, la musique savante, qui ressemble à la musique persane, c'est ce que l'on connait en France depuis Alem Kassimov : un chanteur joue le tambourin "dairé", un petit tambourin avec des anneaux discrets, et deux instruments l'accompagnent dans un système de réponses en canon, le "târ", un luth à long manche avec une table d'harmonie en peau, assez agressif mais qui "articule", qui permet de reproduire les phrasés du chanteur, de façon merveilleuse. Et le "kamantché" lui répond, un instrument à archet .

Il y a là un langage hétérophonique, décalé, où tout le monde se répond, sous formes de "canons". Cette forme est une forme savante, très précise : il existe 12 "mugams" où tout est presque joué par cur, assez loin de l'improvisation telle qu'on la conçoit en Occident : le moindre coup de plectre est codifié. C''est un art très sophistiqué. Les musiques populaires sont portées en effet par des bardes, les "achiks", les "amoureux".

L'achik joue souvent seul, notamment dans la régfion de Tavouz, vers la Géorgie. Il s'accompagne avec des grands sazs impressionants. Il y a souvent chez eux un aspect un peu militaire, sous influence soviétique mais aussi par le caractère des chants, des poèmes épiques qui déroulent des histoires de guerre, de vengeance, de chevaux et d'enlèvements. Ce côté guerrier se retrouve dans l'uniforme : les vieux achiks se présentent en chapeau de mouton, veste militaire, ceinturon de l'armée, pantalon de cheval et bottes, avec de grands saz à cordes doubles, ça a beaucoup d'allure. CMTRA : Ton concert de l'Amphithéâtre fera-t-il la synthèse de ton séjour en Azerbaïdjan ?

M.L. : Comme tu le sais, il faut du temps pour digérer une musique. Il faut être à l'aise avec les nouveaux répertoires. Ce qui m'intéresse ce sont les "rengs", les répertoires de danse. Quand tu entendras les rengs, tu vas penser à la bourrée, car les rythmes sont proches, notamment par leur travail sur l'hémiole. Je n'ai pas voulu travailler avec des joueurs de 'oud, mais avec des jouers de târ afin de comprendre leur technique. Et notamment pour ce travail d'articulation dont je parlais, et que je voudrais rendre sur le 'oud.

Il y a des pièces très belles que j'intégrerai tout de suite à notre répertoire : pour le concert de l'Opéra, je jouerai deux luths différents, le 'oud et aussi le "kopouz", l'ancêtre du 'oud. Il existe encore au Yémen dans la ville de Sanaa, et également en Azerbaïdjan : un grand poète médiéval, Dedeh Gormouz, jouait le kopouz. J'ai construit cet instrument en France l'été dernier sur un plan yéménite du XVIIIème siècle. Je l'ai retravaillé ici avec des luthiers azéris, et je serai content de présenter cet instrument à Lyon. CMTRA : Quelques mots sur cette création, "Montagnes de Feu" ?

M.L. : C'est autour de ce projet de création que nous avons obtenu le prix Villa Medicis hors les murs. "Montagnes de Feu" sera donné en juin à Montpellier et à Grenoble. Nous travaillons avec deux chanteurs azéris, Malik Mansouroff qui travaille avec Alem Kassimov et avec qui j'ai déjà partagé des moments de musique en Espagne il y a quelques années, et un percussionniste exceptionnel, Tadjik Chirinoff.

Nous présenterons aussi un seconde version de "Montagnes de Feu" qui fera alterner flamenco et musique d'Azerbaïdjan, comme nous l'avions fait pour "Les deux Andalousies" entre Espagne et Maroc. C'est une juxtaposition signifiante, car il y a des caractères importants du flamenco que l'on retrouve dans la musique Azerie, des caractères symboliquement "signés", marqués par le feu : il y a une certaine souffrance immédiate, une douleur qui est perçue dans le mode d'émission vocale, dans le mode d'attaque des cordes aussi, une préoccupation essentielle qui est la grande différence entre la guitare classique et la guitare flamenca. Des musiques de douleur et de feu. Propos recueillis par EM. Concert

11/05 - LYON (69) Amphithéâtre de l'Opéra, à 20h30

Rens. 04 72 00 45 45 Contact

Marc Loopuyt

Tél : 04 72 12 08 66/04 68 27 69 38


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