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Um Fado...
Entretien avec Carina Salvado


CMTRA : Comment es-tu tombée dans le fado ?

J’ai toujours fait de la musique. J’ai eu des groupes assez tôt, quand j’étais ado. Ma culture musicale était plutôt grunge, rock ou pop à l’époque. Ensuite, quand j’ai eu 19 ans, j’ai rencontré et écouté des gens de l’univers jazz puis j’ai fait des reprises de standards et des compositions aussi, toujours en tant que chanteuse. Ce sont les rencontres humaines qui m’ont emmenée d’un style musical à un autre et surtout de longues nuits passées à écouter des disques (merci JS Bach), ce qui parfois ouvre de belles portes. Le fado est quelque chose qui s’impose à moi, c’est mon sang mélangé à l’inconnu… Il y a quelques années, je travaillais à Harmonia Mundi et je me suis mise à réécouter du fado, à relever des morceaux aux heures creuses et puis j’ai eu envie de le chanter, le partager…

Tu as donc redécouvert l’un des répertoires de ton pays d’origine…

Voilà. Je suis née ici mais ma famille est là-bas, au Portugal. Je parle le portugais couramment puisque mes parents ont commencé par me parler en cette langue et puis j’ai eu l’occasion d’y aller très régulièrement, même si je ne découvre réellement le pays que depuis deux ans parce qu’en tant que fille, je n’avais pas tellement la possibilité de sortir ou de découvrir par moi-même. Cette année, je suis allée à Lisbonne et j’ai chanté dans des restaurants. J’ai sympathisé avec des gens qui tiennent des bars et tous les soirs j’allais dans ces endroits et j’avais le droit de faire deux ou trois fados. C’était une belle expérience. Par contre, au niveau de la place que j’occupais, ce n’était pas évident. Je me suis rendue compte qu’en n’étant pas née là-bas, j’étais considérée comme une chanteuse de fado « mutante ». On me présentait toujours comme « la Française ». Peut-être que si j’allais habiter là-bas, je finirais par entrer dans ce monde du fado traditionnel mais ce n’est pas non plus ce que j’ai envie de faire parce que ce n’est pas mon histoire… Même si ça aurait pu l’être.

On a l’image du fado comme un répertoire triste exclusivement chanté par des femmes…

Non, il y a autant d’hommes que de femmes qui chantent le fado. C’est vrai que les interprètes les plus connues sont des femmes, comme Amalia ou Mariza qui ont fait voyager le fado dans le monde entier, mais il y a aussi quelques interprètes masculins qui commencent à émerger. Il y a énormément de styles différents dans le fado. Celui que chantait Amalia, c’est le « fado-poésie », le « fadochanson », elle reprenait des poèmes ou écrivait des paroles sur des grilles de fado existantes ou écrites pour elle. C’est assez différent du fado populaire qui raconte des histoires de la vie quotidienne. Chaque personne a son répertoire, il y a des hommes qui chantent des fados très poétiques, très lents, d’autres plus drôles, plus salaces, il y a des chants à plusieurs où l’on se répond, on s’interpelle… Le fado est né à Lisbonne au 19ème siècle, dans le quartier de l’Alfama. Au début ça se chantait dans les bars, les restaurants, dans les maisons closes. Aujourd’hui c’est encore très vivant dans les petits lieux de quartier et ça joue bien, il y a de bons chanteurs, de bons guitaristes, malgré les lieux touristiques. Les anciens, là-bas, peuvent en parler des heures, c’est une histoire très riche.

Et ton groupe, Um fado ?

Au départ je cherchais surtout un contrebassiste pour m’accompagner parce que j’aime beaucoup cet alliage voix / contrebasse. Mais à l’époque, Joan, le contrebassiste actuel du groupe préférait commencer avec d’autres instrumentistes. J’ai donc proposé à Stéphane Cézard, qui est mandoliniste, et à Benoît Convert, guitariste, de nous rejoindre. Je leur ai fait écouter la musique, ils ne connaissaient pas trop, ça leur a plu et voilà, on s’est lancé dans l’aventure.

Est-ce que ça correspond à la formation instrumentale du fado traditionnel ?

Pas tout à fait. La formation de base est composée de la guitare classique et de la guitare portugaise, un instrument proche de la mandoline mais plus gros, les cordes sont doublées. La contrebasse est arrivée plus tardivement. Vers où allez-vous, musicalement ? Pour le moment on fait des fados traditionnels. On choisit ceux qui nous plaisent et on les arrange, en restant généralement assez proches de l’enregistrement. Mais j’ai vraiment envie d’aller vers autre chose, de coller d’avantage à mon histoire comme le font les gens qui chantent le fado, làbas… J’ai envie de créer, d’approfondir en allant chercher ailleurs, dans des choses qui nous plaisent même si elles viennent d’autres pays. Et puis d’écrire. J’ai plus écrit en rock et en anglais mais j’ai envie de composer des fados. On en a déjà deux ou trois… J’ai vraiment besoin qu’on soit plongé dans une énergie de groupe pour pouvoir avoir une belle marge de travail… En ce moment j’écoute beaucoup King Crimson, ça n’a rien à voir, rock des années 70 mais il y a un morceau que j’ai envie de faire en fado.

Es-tu en contact avec les communautés portugaises de Lyon ?

Pas du tout. Peut-être que j’y viendrai mais pour le moment j’y vais timidement ; ça représente une partie de mon histoire, de mon éducation, avec quelques aspects négatifs… Pour moi c’est chargé, plein d’images, d’interdits surtout. C’est sans doute une idée distordue que d’englober une communauté là-dedans mais une fois de plus c’est mon parcours, je compose avec ce qu’il y a dans mon ventre…

Propos recueillis par Y. E.


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