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Chantons sous l'occupation

Entretien avec Mourad Laangry, commissaire de l'exposition "Chantons sous l'Occupation" présentée du 4 décembre 2003 au 28 mars 2004 au Centre d'Histoire de la Résistance et de la Déportation de la Ville de Lyon CMTRA : Comment est née l'idée de réaliser une exposition sur le thème de la chanson durant l'Occupation ?

Mourad Laangry : À l'origine de ce projet, il y a l'acquisition par le Centre d'Histoire de la Résistance et de la déportation, en juin 2000, d'une importante collection lyonnaise de partitions. Quatre-cent partitions sont venues s'ajouter aux quelques dizaines d'autres déjà conservées par le CHRD. Non exhaustive, cette collection présente néanmoins un intérêt musical, textuel, visuel, historique et sociologique certain. Pouvez-vous nous présenter l'exposition "Chantons sous l'Occupation", son contenu et son organisation ?

L'exposition permet de découvrir l'extraordinaire dynamique de la création musicale ainsi que graphique entre 1939 et 1945 en France. Les documents graphiques et audiovisuels, provenant de fonds institutionnels ou privés, sont mis au service d'une scénographie dynamique reconstituant les atmosphères artistiques de l'époque : atmosphère colorée inspirée des cabarets et des salles de spectacles parisiennes et atmosphère sobre reflétant les temps de restrictions et de résistance contre l'occupant et le régime de Vichy. On est accueilli par un extrait de chanson à la gloire de la chanson Française : Marie-Dubas, Vive la chanson française, écrit par Edgard Liger-Bélair, au Brésil, en 1941 :

"Notre chanson c'est notre histoire /D'aussi loin que nous existons. / C'est notre drapeau, notre gloire / Depuis Roland, Berthe et Magloire, / Charlemagne et les fils Aymon. / Qu'auraient fait en 1916, / Nos poilus sans la Madelon? / Qu'auraient fait, sous Napoléon, / Les grognards sans la Marseillaise? / Et vive, et vole, et vive la chanson / Et vive la chanson française!"

Cet extrait baigne dans une atmosphère artistique rappelant l'exceptionnelle qualité des arts graphiques de cette époque.

Le parcours suit son cours, dans un ordre chronologique, à travers les événements historiques. On passe de la déclaration de guerre, à la guerre, à l'exode, à l'Exil, à la France à l'heure allemande, à la France sous Vichy, à la propagande et contre-propagande, la chanson résistante : clandestine, emprisonnée ou déportée, et enfin à la Libération.

Par ailleurs, la scénographie, point essentiel de cette exposition, s'appuie sur des symboles forts : le grillage pour l'entrave de la liberté, le vélo pour l'exode et la radio pour la propagande et contre-propagande. Quant à l'atmosphère de l'époque, elle se dégage de la reconstitution fidèle d'un music-hall, d'un cabaret, d'une loge d'artiste, d'un guichet, d'une boutique de radio-télévision, d'une boutique de disques, d'une colonne Morris et d'un habitat.

Les objets et documents exposés, originaux ou reproduits sur des panneaux, sont peu connus du grand public. Certains proviennent de fonds privés comme les photographies de Roger Schall qui mêlent pertinence du témoignage historique à une grande qualité artistique.

D'autres documents artistiquement moins spectaculaires car réalisés avec "les moyens du bord" par des prisonniers en France ou dans les stalags expriment cet acharnement de continuer à vivre, malgré l'humiliation, à travers une activité culturelle comme la chanson. Y a-t-il eu à cette période une dynamique de création artistique particulière ?

Malgré la censure et le poids des contraintes idéologiques allemandes et celles du Régime de Vichy, les années d'occupation ont été un grand moment de profusion des chefs-d'œuvre dans tous les domaines de la création artistique. Comment expliquer ce besoin de créer ? Comment une culture divertissante, dépourvue de toute empreinte idéologique peut-elle s'épanouir parallèlement à des formes d'expression qui relèvent d'un souci d'embrigadement ? Comment l'activisme idéologique du Régime de Vichy aussi incompatible qu'il soit avec la liberté de création, peut-il stimuler un dynamisme des expressions et pratiques culturelles ? Le dynamisme culturel de la France occupée s'explique en premier lieu par les opportunités offertes par l'occupation allemande qui dans le souci d'éviter les troubles sociaux et d'assurer un retour à une vie normale, ont mis en place, très tôt, un projet culturel reposant sur une organisation et des moyens considérables et sur une participation active des écrivains et des artistes français, entraînant ainsi l'épanouissement et le maintien, notamment à Paris, d'une vie artistique florissante.

Côté régime de Vichy, la fracture existante entre les intentions idéologiques du régime et l'adhésion des Français pousse parfois ce premier à chercher à accroître son impact en autorisant des espaces de liberté notamment à la Radio-Nationale. Ces opportunités ont permis à la chanson de variété, incompatible avec le discours officiel, de continuer son épanouissement. Ce dynamisme tient également à la naissance de nouveaux espaces consacrés à la chanson tel le Club privé de la chanson, à l'essor de l'industrie du disque et du cinéma, au développement important des moyens de diffusion comme la radio. Il émane aussi des qualités intrinsèques de la chanson qui la rendent atemporelle, insouciante et divertissante.

Dès le début de l'Occupation, en dépit d'un réveil très dur, la chanson apparaît comme une réponse à un besoin de distraction et d'évasion, et un moyen d'oublier les préoccupations de la vie quotidienne. Comment avez-vous procédé pour construire une exposition autour d'un patrimoine immatériel et sonore ?

La collection de partitions acquise par le CHRD ne pouvant constituer à elle seule une exposition, il était nécessaire de lui adjoindre d'autres éléments graphiques et audiovisuels de la même époque. Lors de notre réflexion sur la réalisation du synopsis de l'exposition, nous avons découvert que la chanson est le parent pauvre de la recherche historique et linguistique en France, ou comme le dit à juste titre Monsieur Laurent Douzou, professeur à l'IEP de Lyon, la chanson est le cadavre des cadavres. Les publications sur la chanson française sont nombreuses, mais rares sont celles qui répondent à l'objectif de notre projet à savoir proposer à notre public, à travers la chanson, une lecture de l'histoire de France, entre 1939 et 1945.

Pour cette raison, nous avons centré notre première activité de préparation de l'exposition sur l'analyse du texte de la chanson et des illustrations des partitions. Au cours de l'étude, nous avons été surpris par la richesse de certains textes en matière d'information sur les événements de l'époque ; informations que l'on peut classer dans un ordre chronologique, en fonction des événements survenus en France entre 1939 et 1945. Nous avons donc décidé d'exploiter ces données offertes par le corpus étudié en les classant en fonction des événements historiques. Pour donner à ce classement toute sa valeur historique, nous juxtaposons les partitions aux documents et objets purement historiques. Comment avez-vous rassemblé le matériel présenté ? Quels partenaires sont associés à cette exposition ?

Pour compléter la collection des partitions du CHRD, nous avons recensé toutes les institutions, en premier lieu, publiques, conservant des collections sur la chanson. Nous avons remarqué que seule la BNF, département de la musique et département arts de spectacles, est susceptible de répondre à notre demande. Les autres établissements comme le MNATP et le Hall de la chanson conservent des collections hétéroclites ne correspondant pas à nos besoins. Pendant notre recherche des collections, nous avons remarqué que les collections privées représentent la source la plus importante, la plus étudiée et la plus disponible. Pour cette raison, notre exposition compte plus de 70% de documents provenant de collections privées. Y a-t-il des événements proposés en marge de l'exposition ?

Pour compléter le contenu de l'exposition nous proposons une série de conférences, un colloque et des activités culturelles pour les jeunes. Le 5 décembre aura lieu une conférence de Pascal Ory, professeur d'Histoire contemporaine à l'Université Paris-I, spécialiste de la vie politique et de la vie culturelle de la France sous l'Occupation, sous le thème Vie artistique et politique culturelle en France sous l'Occupation. Le 6 janvier 2004, une conférence chantée de Martin Pénet, se déroulera à l'École normale supérieure de lettres.

En s'appuyant sur ses rencontres avec d'anciens acteurs du milieu de la chanson, Martin Pénet s'intéressera à la vie culturelle de l'époque et plus particulièrement au quotidien singulier des chanteurs. Le 3 février nous projetterons le film Chantons sous l'occupation de André Halimi à la Bibliothèque municipale de la Part-Dieu, suivi d'un débat. Enfin, un colloque aura lieu en mars sur le thème Conserver, étudier et exposer la chanson, qui permettra de découvrir l'importance de la chanson française dans les collections publiques et privées, de mieux cerner les enjeux liés à sa conservation et à sa diffusion, et d'appréhender son rôle dans la transmission de notre histoire collective. Propos recueillis par Y.E. Chantons sous l'Occupation

exposition au Centre d'Histoire de la Résistance et de la Déportation, du 4 décembre

2003 au 28 mars 2004.

14 av Berthelot 69007 Lyon

Tel : 04 78 72 23 11 / fax : 04 72 73 32 98

Mail : [chrd@mairie-lyon.fr ->chrd@mairie-lyon.fr]

6 janvier 2004 18h30, Chanter sous l'Occupation ?: Conférence chantée avec Martine Pénet

9 janvier 2004 Victor Basch: Conférence de Madeleine Rebérioux

26 et 27 mars 2004: Colloque sur Conserver, étudier, et exposer la chanson


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