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20. Gong
Association Kotekan, Gamelan Balinais

Gong est un spectacle dont les pièces instrumentales présentées explorent les possibilités du gamelan. Cet ensemble de percussions indonésiennes est surtout connu pour sa musique lancinante et hypnotique. L’ensemble permanent Nusa Cordon de l’association Kotekan s’en empare de manière originale à travers les compositions de Jean- Pierre Goudard.





CMTRA : Pouvez-vous nous présenter le gamelan et décrire la musique que produit ce grand orchestre de métal ?

Un gamelan c’est avant tout un ensemble de percussions frappées. Cet ensemble est essentiellement constitué de gongs, d’instruments à lames montés sur résonateurs, auxquels on adjoint des tambours et des jeux de cymbales. Si on s’arrête à la seule île de Bali, il y a plus de vingt sortes de gamelans différents. Ce qui fait leur différence c’est le matériau de construction ; il y a des gamelans en bambous, en fer, le nôtre à Kotékan, est en bronze. D’autre part, il y a aussi des variations de taille, le nombre de musiciens peut aller de 4 à 30. Il y a deux grandes familles de gamelans, le gamelan de Java, dont le style et l’instrumentarium sont influencés par la culture musulmane, et le gamelan balinais, où l’île est restée de tradition hindouiste. À Bali, l’instrument reste extrêmement populaire, même si au départ cet instrument était l’apanage des princes.

Comment et quand le gamelan estil joué en Indonésie ?

Le gamelan est associé à beaucoup de grandes cérémonies, notamment religieuses, mais il est aussi joué lors d’occasions plus courantes de la vie ; la naissance d’une enfant, un mariage, un décès … A ces circonstances sont associées des répertoires spécifiques. ABali, il y a plus de 20 000 temples ; tous ces temples ont un anniversaire où l’on va jouer. À l’intérieur de familles élargies, il peut y avoir un gamelan, dans un quartier, il peut y avoir un gamelan, on en possède aussi par corps de métier, la confrérie des charpentiers ou des riziculteurs ont un gamelan. C’est un instrument éminemment populaire qui rythme les événements de la vie , les musiciens sont essentiellement des amateurs hommes adultes.



Pouvez-vous essayer de décrire cette musique si déroutante pour nos oreilles occidentales ?

Il faut d’abord préciser qu’on n’est pas sur des échelles sonores qui sont les mêmes que les nôtres, donc pour les habitués à l’échelle absolue occidentale, l’instrument peut paraître déroutant. Les différents instruments du gamelan sont associés en paires et sont volontairement accordés différemment pour produire un battement qui représente l’équilibre des choses. C’est une notion très importante pour les balinais. Un instrument seul est faux sans son complément, il est incomplet. C’est la complémentarité des deux qui donne le son voulu. À cela s’ajoute, en ce qui concerne les gamelans en métal, une résonance incroyable, de très longue durée et d’une très grande stabilité. Dans le jeu instrumental, il va falloir maîtriser cette résonance ce qui nécessite une très grande motricité au niveau des mains car on va parfois à de grandes vitesses, il faut pincer les lames, les maîtriser, tout en frappant avec l’autre main. Il faut être en osmose avec le voisin immédiat avec qui l’on complète la partie jouée, mais simultanément avec l’ensemble des personnes qui compose le gamelan. Le rythme est très présent, des jeux de polyrythmie très complexes sont élaborés. Il y a aussi une dimension mélodique qui se déploie sur des échelles de 5 ou 6 sons (mode pelog ou slendro).



Quels sont les éléments les plus surprenants de cette musique pour notre culture musicale?

La répétition, le côté cyclique. Il m’a fallu du temps pour amener mes petits camarades à cette sensation-là où il faut être dedans pour comprendre. Il faut se poser dedans, et ce n’est pas toujours facile pour nous, c’est une tout autre relation au temps.



Comment transposez-vous cette pratique de l’instrument en France?

Ce répertoire est très lié à un culte et une culture. Je me voyais mal rentrer dans l’instrument par cette dimensionlà. Ce qui m’a intéressé dans le gamelan c’est l’environnement sonore et la manière de le mettre en oeuvre, c’està- dire l’organisation collective de cette pratique musicale. Je viens par mon itinéraire musical personnel des grands ensembles de jazz et des musiques improvisées. Ce qui m’attire, ce sont ces grands ensembles où l’on est un certain nombre à mettre en oeuvre nos énergies et nos compétences pour faire advenir un événement musical. J’ai gardé des principes d’orchestration balinais quand aux rôles des instruments, mais j’amène une démarche plus contemporaine dans la manière de s’emparer d’un objet sonore sous toutes les coutures, ce qui va nous amener à jouer avec les doigts, à ajouter des instruments … Par contre les principes d’orchestration dans la tradition de l’instrument sont tellement riches que je les utilise beaucoup. Ce que j’ai rajouté aussi, c’est le silence car dans leur musique, il n’y a pas de silence, c’est la tourne permanente. J’ai introduit cette possibilité-là pour aérer, pour agrandir l’espace musical.



Un grand orchestre sans chef d’orchestre, comment ça s’organise ?

Il y a un partage de responsabilités. D’abord dans le gamelan tout le monde sait tout faire, tout le monde est capable d’occuper tous les postes, un même musicien peut se retrouver aux gongs ou aux tambours…. C’est un des aspects qui m’a beaucoup intéressé dans le gamelan, ça stimule la vie de l’orchestre et c’est aussi très intéressant pour la dimension pédagogique. Tout le monde connaît tout, donc quand on occupe une place, on la joue d’autant mieux de l’intérieur que l’on conçoit son rôle dans son agencement avec les autres. cela donne une précision et une compréhension très grande de ce qui est joué. |||

Comment élaborez vous vos compositions ?

Pour le spectacle “Les Diseurs” (2004) j’ai travaillé sur l’identité des gens. Je suis parti de l’identité de chaque instrumentiste de manière très arbitraire en inventant des codes pour relier le sonore potentiel et la personne ellemême. À partir du nom de chacun des musiciens de l’orchestre, je développe une rythmique spécifique qui devient celle de chacun individuellement. Je décréte très arbitrairement les temps forts à partir desquels s’organisent les temps faibles. Ensuite je calcule une mélodie, j’affecte une valeur aux lettres en fonction de leur place dans l’alphabet. Je décide des hauteurs en fonction des instruments. Puis j’introduis le silence. Il me reste ensuite à étirer le temps. Il y a de la logique et de l’aléatoire dans mes compositions. Cela constitue une base qui me permet de développer des potentiels. 24 instrumentistes ont alors donné 24 univers sonores différents qui ont constitué la base d’un plus vaste travail. Tout peut partir d’un nom, d’un lieu, mais aussi d’une image, d’un texte qui induisent une architecture sonore. Aujourd’hui, le spectacle Gong amène la confrontation avec des instruments occidentaux et par là-même un travail de composition plus rythmique qui s’appuie sur des traditions musicales puisées de par le monde et que je revisite avec mon propre imaginaire.



Pensez-vous que ces mélodies recèlent une certaine vérité sur les personnes ?

Oui …. ou à l’inverse les gens se les approprient. C’est une démarche assez symbolique. En ce moment, je travaille avec des enfants sur Givors. L’intérêt de cette démarche, c’est de commencer un travail musical à partir d’eux, par ce qu’ils ont de plus personnel, leur prénom et leur nom. Entendre la rythmique de leur prénom, c’est arbitraire au départ, mais ça devient leur histoire tout de suite. Je peux travailler sur l’individu mais aussi sur les lieux et donc sur la dimension collective. C’est cela qui me passionne, lorsqu’on a à la fois du singulier, de la différence, et qu’on la lie à la dimension collective, au vivre ensemble. Le gamelan permet cela.



Parallèlement à vos créations avec une troupe permanente, vos interventions pédagogiques constituent un aspect important de votre travail sur l’instrument. Comment arrivez-vous à faire sonner un instrument si complexe comme le gamelan avec des néophytes?

Les projets de création comme Gong sont proches de mes activités pédagogiques menées lors d’ateliers dans des écoles primaires, des collèges et lycées ou dans des conservatoires de musique. Le gamelan en ce sens propose un outil pédagogique passionnant et complet. Je fais jouer des petites pièces balinaises pas trop compliquées qui permettent aux gens de rentrer dans cette petite bulle sonore et de comprendre des choses de l’instrument. Mais j’ai aussi une autre approche qui allie la danse à l’improvisation. Je travaille dans les écoles avec l’Education Nationale, sinon, en ce moment beaucoup avec les conservatoires ou les écoles de musiques, où je fais parfois des résidences temporaires sur plusieurs jours. Je fais des ateliers sur plusieurs jours, j’essaie d’organiser une conférence sur l’instrument avec Catherine Basset (la grande spécialiste française de cette culture), et de provoquer une présentation publique de ce qui a été travaillé ensemble, le tout pouvant se terminer in fine avec l’accueil du spectacle Gong.



De nombreux musiciens contemporains doivent beaucoup au gamelan, je pense notamment à la musique répétitive ... Quels sont les apports du gamelan aux musiques contemporaines ?

Je réécoute beaucoup ces musiciens, notamment Philipp Glass et Steve Reich, « Enstein on the beach ». Je le revisite de l’intérieur, je perçois mieux comment ils se sont emparés de cette musique pour en faire autre chose. Il y a la répétition, imaginer des compositions plus complexes. En France, l’instrument est souvent abordé dans une vision très ethnomusicologique. Il y a une quinzaine de gamelans en France, de tailles différentes, pour certains exposés dans des musées, mais ils ne sont pas tous accessibles. Il y a un à la Cité de la musique, au Musée de l’Homme, à la galerie Sonore d’Angers, il y en a un en ce moment à Marseille. Tout cela est très intéressant, mais j’ai choisi une autre voie, moins traditionnelle. Je crois que nous sommes en France la seule troupe permanente à utiliser et créer sur un gamelan. Je pense qu’il faut décloisonner l’utilisation et la vision qu’on a de cet instrument pour lui redonner sa dimension populaire et le voir plutôt comme une fantastique base sonore et humaine de départ, à partir de laquelle on peut imaginer, rêver, inventer …. Je reste très attaché à cette définition de l’ARFI : « à la recherche d’un folklore imaginaire » Si elle n’y est pas, je l’invente, je l’emprunte, sans état d’âme ni tabou. Je crois que le public ne s’y trompe pas et reçoit, ressent, l’ensemble de ce collectif : l’alliance du singulier et du pluriel. La grande difficulté, c’est de pérenniser un tel ensemble (20 musiciens). Les possibilités de jouer en public restent trop peu fréquentes. Il est souhaitable pour que vive cette démarche spécifique autour du gamelan Nusa Cordon de trouver des moyens et de faire entendre au plus large public la richesse de cette musique. Chaque concert nous le prouve au vue de l’enthousiasme du public. Dommage que les programmateurs restent aussi frileux face aux grands ensembles !

Propos recueillis par Péroline Barbet



Contacts: Association KOTEKAN - Jean-Pierre GOUDARD

Île Cordon La Pierre 01300 BRÉGNIER-CORDON

04 79 87 25 64 ou 06 84 05 66 08

Mél : [goudardpauget@wanadoo.fr->goudardpauget@wanadoo.fr]

http://www.kotekan.fr.st

Date :

Le 24 janvier à

Bourgoin-Jailleu

Théâtre Jean Vilard

20h30

Réservations : sur place



Société des concerts

Tel : 04 74 43 52 61


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