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Le Chanteclerc
La musique près de chez vous, en péril !

Entretien avec Pascal Morel-Tivan CMTRA : Pascal, vous êtes un des responsables du café le Chantecler, qui est connu depuis 6 ou 7 ans pour avoir une programmation régulière et abondante, et en tout cas hebdomadaire, de musique vivante dans le secteur des musiques actuelles avec du jazz, de la chanson, du rock, du blues, des musiques du monde et toutes les formes correspondantes à l'appellation musiques actuelles. Vous avez reçu entre autres, Arno, Les Têtes Raides, Les Barbarins Fourchus, des dizaines et des dizaines d'artistes, mais aussi, Los Diez, Itinérance, Jack Bon... Or, depuis quelques semaines cette programmation a pris fin. Pouvez-vous nous expliquer les raisons de cet arrêt brutal ?

Pascal Morel-Tivan : Dès l'ouverture, on a commencé assez rapidement des concerts, des animations musicales, et depuis un certain temps se pose pour le Chantecler comme pour d'autres lieux le problème de la conformité à la nouvelle législation, référence au texte de fin 1998 en ce qui concerne les nuisances sonores.

Ce problème, nous n'avons pas attendu la loi pour nous le poser. C'est-à-dire que bien avant, on a pu réagir par rapport au fait que la musique vivante, certains soirs, si elle était diffusée tardivement, et vu la configuration du café, pouvait nuire au voisinage. On a donc réagi assez rapidement en changeant les horaires de programmation de ces concerts. Depuis bientôt 2 ans, entre autres depuis que nous avons une licence d'entrepreneur de spectacle, les concerts se déroulaient de 19h30 à 22h00.

Pour autant, il nous a fallu nous plier à la législation pour la simple et bonne raison que nous avions la plainte continuelle d'un voisin (et d'un seul d'ailleurs) qui, par ses insistances et ses harcèlements, a fait réagir l'administration et nous a fait appliquer exactement la même législation que si nous avions une fermeture tardive. CMTRA : On a une loi, on a des horaires qui sont plutôt au tout début de soirée, mais on a une application pleine de cette législation.

P.M-T. : C'est ce que l'on trouve parfaitement injuste. C'est-à-dire qu'il n'y a pas eu cette tolérance indispensable pour un lieu qui visiblement a tenu compte du problème, qui a fait des efforts. Nous ne proposons pourtant pas des musiques tapageuses, cela reste toujours du bruit organisé, d'autre part, nous avons toujours tenu compte de ce problème de nuisance. Que cette législation s'applique exactement de la même façon a un lieu qui fait de la musique à 9h00 le soir qu'à un lieu qui en fait beaucoup plus tard (même si évidemment, je souhaite au mieux à ceux qui font de la musique tard de pouvoir le faire), à ce moment-là on peut imposer des normes un peu différentes d'insonorisation.

Si le Chantecler passe à la trappe sur la base d'une musique, d'une programmation qui se déroule entre 19h30 et 22h00, cela veut dire que tout le monde passera un jour ou l'autre à la trappe. CMTRA : Je vous sens évidemment amer, quel sentiment éprouvez-vous quand vous pouvez constater que dans l'agglomération il y a maintenant des manifestations comme "Les Nuits de Fourvière", avec des horaires plus tardifs, qui arrose accoustiquement une population de voisinage plus importante et qui a l'autorisation de se dérouler sur une durée de 2 mois depuis l'été dernier, alors qu'un lieu comme le Chanteclerc se trouve dans l'obligation d'arrêter sa programmation, une question se pose ?

P.M-T. : Absolument, c'est une autre injustice. Même si, il y a lieu de se réjouir des manifestations comme entre autres celles de Fouvrière, parce qu'en aucun cas, il nous viendrait à l'esprit d'en critiquer le fond, on se rend compte qu'il y a deux poids deux mesures. Ces événements dont, soit la ville, soit le département, soit la région se prévalent, ce que j'appellerais de façon incisive le vernis culturel, même si il y a de la culture derrière, sont un véritable faire-valoir organisé, en comparaison à de plus petits lieux qui ne répondent pas du tout à ce critère, mais qui sont le tissu culturel de la ville au quotidien, celui qui anime, celui qui entretient la vie de tous les jours.

C'est un bonheur de pouvoir sortir et de trouver des événements, d'aller à la rencontre d'événements, même si ce sont des petits, parfois de plus grands, localement, sans avoir à partir ni en banlieue, ni bien loin. Or, ces activités, répétées, hebdomadaires ou quotidiennes n'ont pas du tout la même tolérance que ces grands événements. Là, où l'on cite Fourvière, on pourrait citer Gerland et bien d'autres, donc très bien pour les grands concerts, mais alors pourquoi tolérer pour ces événements ce que l'on n'admet pas pour ces petits lieux alors qu'ils représentent à peine un dixième des nuisances représentées par les grands festivals. C'est encore une injustice que l'on a envie de dénoncer. CMTRA : Il existait une loi avant 1998, qui n'avait pas de cadre précis. Est-ce que les conditions d'applications, sans aller jusqu'à remettre en cause la nouvelle loi, vous paraissent modulables. Est-ce qu'il y a possibilité d'ouvrir une réflexion avec les diverses institutions qui appliquent cette loi pour parler un peu de la manière de l'appliquer, des sanctions qui en découlent, et de l'interprétation de cette loi ?

P.M-T. : Cela me paraît tout à fait indispensable. C'est ce que j'appellerais une loi réactive, c'est-à-dire quelque chose qui a été pondu à la hâte pour répondre à un problème sans considérer l'ensemble du contexte. Il fallait résoudre ce problème par rapport à ce que l'on appelle les nuisances sonores, en milieu urbain, la nuit. Il y a eu donc un mot d'ordre qui a éveillé tous les soupçons. C'était le bruit, la nuit, ça nuit !", ce qui n'est pas faux. On peut répondre aussi à cette petite phrase : "Une ville, la nuit, ça vit !", et qu'avec le premier slogan dévastateur, on a armé le bras de tous les intolérants. A partir du moment où l'on a donné aux gens les moyens de réagir, de constater des bruits, on les a rendu parfaitement impatients et intolérants. Partant de là, les insatisfaits feront toujours plus de "bruit" que les autres.

Cette loi répond essentiellement à un besoin dans l'urgence de résoudre un problème qui aurait pu être résolu avec un consensus beaucoup plus large, de réflexion sur le milieu de la culture, sur les lieux de la culture, sur les heures de diffusion des programmes. Au lieu d'appliquer tout de suite des chiffres, des mécanismes et de la technologie sur des lieux par des moyens d'analyse acoustique, de limiteur - compresseur etc., en ne réfléchissant pas à des moyens, à une volonté plus générale, qu'il aurait suffit d'essayer d'établir un consensus entre les riverains et les lieux d'activité musicale culturelle, alors que tous ces gens-là devraient forcément faire bon ménage. Mais, on les a plutôt dressés les uns contre les autres, et cela a été l'effet dévastateur de cette loi.

D'un côté les mécontents, de l'autre ceux qui voulaient faire des choses, et une loi applicable de façon tout à fait aveugle à tous, quelle que soit l'heure, quels que soient les moyens, sans même poser la question d'une aide éventuelle au lieu qui aurait besoin d'apporter un matériel d'insonorisation pour continuer à subsister. C'est un exemple parmi tant d'autres pour que l'on voit bien qu'il y a eu effectivement un texte réactif pour donner tout de suite satisfaction à une certaine partie de l'électorat, à ceux qui pensent qu'il y a trop de bruit en ville. Du coup, on a oublié une immense majorité de ces gens qui profitent de cette vie en ville, qui en vivent et qui en sont heureux. CMTRA : Une petite note d'espoir peut-être pour terminer. Est-ce qu'il y a des perspectives d'évolution rapide, ou de discussion entamée pour rétablir les concerts au Chantecler ou dans d'autres établissements ?

P.M-T. : On a notre idée à ce sujet. Il faudrait bien sûr que l'ensemble des acteurs se fédère. Dans l'immédiat, nous ne pouvons pas remettre en question cette loi car elle est nationale, donc on ne peut même pas se plaindre que son application localement est plus ou moins discriminatoire. Il y a lieu de répondre par un projet au niveau de chaque ville qui rassemblerait les différents interlocuteurs, les différents partenaires, en s'interrogeant sur les modes d'application de cette loi, et je dirais une nouvelle validité d'activité pour les lieux concernés.

C'est-à-dire que si l'on veut bien de cette vie culturelle, de ces spectacles vivants en ville, et bien il y a moyen d'établir une charte de qualité. On demanderait aux lieux de les appliquer, ce qui suppose de passer par certains termes des fameux textes de 1998, bien entendu, en limitant les vraies nuisances sonores, mais le tout, je dis bien dans un contexte quand même d'acceptation du fait et une tolérance minimum. Je prends comme exemple tout simplement que la nuit on n'empêche pas les voitures de rouler pour le seul prétexte qu'elles font du bruit, et l'on pourrait citer bien d'autres exemples aussi banals que celui-là.

La première question est : "Les lieux d'activités culturelles sont-ils un mal ou un bien nécessaire ?", et la deuxième question : "Est-ce une réponse que d'envoyer en banlieue et dans les grandes salles toutes les activités musicales, culturelles, les spectacles avec comme seul objectif d'éviter les nuisances sonores pour les riverains ?". La réponse c'est "non" évidemment, car les moyens ne sont pas du tout les mêmes, en ce sens où l'on ne passera jamais le même genre de spectacle, on aura jamais la même stratégie culturelle dans les grandes salles et dans les petites. D'une part, les petites salles sont des viviers pour les grandes, d'autre part il y aura des ambiances, des instants tout à fait privilégiés dans les petits lieux qui seront absolument impossibles à reproduire dans les grands, pour autant ces deux choses-là ne sont pas comparables, et elles peuvent même travailler dans une certaine continuité, mais ne sont pas comparables. Les deux doivent exister, aussi bien en centre ville qu'en banlieue. Propos recueillis par J.B. Contact

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